Surveillance aérienne de la mer du Nord en 2020

En 2020, l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique (IRSNB) a réalisé 158 heures de vol au-dessus de la mer du Nord dans le cadre du programme national d’observation aérienne. Dix déversements opérationnels par des navires ont été observés, ainsi qu’un déversement accidentelle causée par une collision entre 2 pétroliers. Des taux de soufre suspects ont également été relevés dans les panaches de dix navires. Depuis 2020, les émissions d’azote peuvent également être mesurées avec le capteur renifleur. Avec cette extension, la Belgique continue à jouer un rôle de pionnier dans le contrôle international des émissions des navires. Malgré la pandémie de Covid-19, l’avion a également participé avec succès à une surveillance coordonnée au niveau international des installations pétrolières et gazières dans la partie centrale de la mer du Nord. En outre, les recensements annuels de mammifères marins ont été effectués avec succès.

L’avion de surveillance belge en action. © NL Coastguard

Aperçu des vols de surveillance

Dans le cadre du programme national de surveillance aérienne, 158 heures de vol ont été effectuées au-dessus de la mer du Nord en 2020. Ce programme est organisé par le Service Scientifique UGMM (Unité de Gestion du Modèle Mathématique de la Mer du Nord) de l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique, en collaboration avec le Ministère de la Défense. En raison de la pandémie de Covid-19, moins d’heures de vol ont pu être effectuées qu’initialement prévu. Toutefois, dans ces circonstances exceptionnelles et difficiles, une partie considérable des heures de vol prévues (environ 75 %) ont été effectuée, cela grâce à l’élaboration et à l’application d’une stratégie Covid-19 élaboré.

La majorité des heures de vol concerne des vols nationaux (136 heures) :

  • 128 heures dans le cadre des missions de la Garde côtière belge :
    • 92 heures de contrôle de la pollution : 56 heures pour la surveillance des déversements d’hydrocarbures et d’autres substances nocives (Annexe I, II et V de MARPOL) et 36 heures pour le contrôle des émissions de soufre par les navires (application de l’Annexe VI de MARPOL / SECA – Sulphur Emission Control Area, voir plus loin) ;
    • 27 heures destinées au contrôle des pêches, à la demande du service flamand « Dienst Zeevisserij » ;
    • 9 heures de vols déclenchés par divers évènements, dont un déversement causé par une collision, une importante marée noire accidentelle sur l’Escaut occidental, un rapport sur de grandes quantités de matière brune qui s’est avérée être des algues, et un rapport sur une baleine dans les eaux belges.
  • 8 heures de surveillance des mammifères marins.

Par ailleurs, 22 heures ont été consacrées à des vols internationaux, spécifiquement lors de la mission « Tour d’Horizon » de contrôle des plateformes de forage en mer du Nord (mission internationale dans le cadre de l’accord de Bonn).

Pollution marine accidentelle

Les 12 et 13 mai 2020, à la suite d’une collision entre deux pétroliers, le m/t Isolde et le m/t Navigator Ceres, une pollution marine accidentelle a été observée qui consistait d’un liquide nocif autre que du pétrole. La pollution provenait de l’Isolde qui était légèrement endommagée. Les traces huileuses (volume limité) observées à la surface de la mer près de l’Isolde pendant 2 jours et 4 vols consécutifs ne semblent pas avoir été causées par des déversements de cargaison, mais par une perte accidentelle de Bioneptan, une bio-huile utilisée pour lubrifier les hélices. Compte tenu de sa nature et du volume limité déversé (< 100L), cette pollution accidentelle n’a pas représenté une menace majeure pour le milieu marin.

Perte accidentelle de Bioneptan du M/T Isolde. © IRSNB/UGMM

Déversements opérationnels de navires

En plus de la pollution accidentelle, dix cas de pollution opérationnelle par des navires ont été observés en 2020 :

  • Deux petits déversements d’hydrocarbures (Annexe I de MARPOL) dont les déversements n’ont pas pu être reliées à un navire.

  • Huit pollutions par des substances liquides nocives autres que les hydrocarbures (Annexe II de MARPOL). Une de ces huit pollutions était reliée à un navire. Une vérification a été demandée à l’escale suivante, qui a révélé qu’il s’agissait d’un déversement autorisé de résidus d’huile de tournesol (Annexe II de MARPOL).
  • L’UGMM reçoit également des alertes régulières provenant de détections par satellite d’une éventuelle pollution marine. Ce service de surveillance par satellite Clean Sea Net (CSN) est fourni par l’Agence européenne pour la sécurité maritime (AESM). En 2020, l’avion a effectué cinq missions de vérification à la suite d’une alerte de détection par satellite CSN d’une pollution potentielle dans la zone de surveillance belge. Dans un cas, une pollution a été effectivement confirmée à partir de l’avion, qui impliquait un liquide nocif autre que des hydrocarbures. Lors des quatre autres vérifications, (plus) rien n’a été observé. Pour chaque vérification, un retour d’information a été fourni à l’AESM.

Les chiffres démontrent que le nombre de déversements d’hydrocarbures a fortement diminué au cours de la dernière décennie (premier graphique), mais que la pollution par d’autres substances nocives reste un problème courant, et semble même être en augmentation (deuxième graphique). Il convient de noter qu’il s’agit souvent de déversements conformes aux normes internationales de déversements figurant à l’Annexe II de la convention MARPOL. À partir de 2021, les normes de déversement de l’Annexe II de la convention MARPOL deviendront plus strictes pour les substances dites « floteurs persistants » telles que les substances paraffiniques. L’impact de ce renforcement des normes de déversement en mer sera suivi dans les années à venir.

La pollution par les hydrocarbures dans les ports belges et l’Escaut occidental

Pendant les vols de transit de l’aéroport d’Anvers (la base d’attache de l’avion) à la mer du Nord, une nappe de pétrole a été observée dans le port d’Anvers et un déversement accidentel de pétrole dans l’Escaut occidental. Ce déversement était due à la corrosion entre le réservoir de lest et de la citerne de décantation du porte-conteneurs Hansa Rendsburg, ce qui a entraîné le pompage de boues (sédiments d’huile) vers l’extérieur lors de la vidange du réservoir de lest. Ces deux constatations ont été immédiatement signalées aux autorités compétentes afin d’assurer un suivi.

Surveillance des émissions de soufre et d’azote des navires en mer

Grâce à l’intégration d’un capteur renifleur dans l’avion, notre pays est reconnu comme un pionnier dans la lutte internationale contre la pollution de l’air par les navires en mer. Ce capteur permet de mesurer sur le terrain les polluants présents dans les émissions des navires.

Depuis 2016 des mésures de soufres sont effectues couramment.  Pour surveiller les limites strictes de soufre des carburants marins dans la zone de contrôle des émissions de soufre de la mer du Nord, 25 vols renifleurs (36 heures) ont été effectués avec l’avion en 2020. Sur les 394 navires dont les émissions de soufre ont été mesurées, 10 présentaient une valeur de soufre élevée suspecte. Ils ont été signalés aux services d’inspection maritime compétents pour un suivi à terre.

Une calibration du capteur renifleur est effectuée avant chaque vol. © IRSNB/UGMM

Grâce à l’intégration réussie d’un capteur de NOx en 2020, l’avion peut désormais également mesurer la concentration de composés azotés (NOx) dans les panaches de fumée des navires. Ce nouveau capteur a été intensivement testé en 2020, ce qui a permis de déterminer les émissions d’azote des 394 navires surveillés. Les procédures de surveillance et de signalement associées ont également été élaborées, ce qui signifie que la Belgique est le premier pays prêt à commencer à surveiller et à faire respecter les restrictions strictes en matière de NOx (émissions d’azote) qui s’appliqueront en mer du Nord à partir du 1er janvier 2021. L’IRSNB continue donc à jouer un rôle clé au niveau international dans le domaine de l’Annexe VI de MARPOL. Lors des tests de 2020, il a été constaté que la grande majorité des navires inspectés étaient déjà conformes aux nouvelles règles, bien que certains aient été recensés avec des concentrations d’azote dans leurs émissions qui étaient plus de deux fois supérieures aux limites qui s’appliqueront à partir de 2021.

Approche d’un navire pour vérifier les émissions de soufre et d’azote. © IRSNB/UGMM

Mission internationale « Tour d’Horizon »

Lors de la mission internationale annuelle « Tour d’Horizon » de surveillance de la pollution marine provenant des plateformes de forage dans la partie centrale de la mer du Nord (dans les eaux offshores néerlandaises, danoises, britanniques et norvégiennes), effectuée dans le cadre de l’accord de Bonn en septembre 2020, l’avion de surveillance a détecté un total de 24 pollutions. En raison de la pandémie de Covid-19, l’équipe a été contrainte de modifier l’itinéraire de vol traditionnel avec des escales dans plusieurs pays de la mer du Nord, et d’opérer exclusivement depuis le Royaume-Uni.

Sur ces 24 pollutions détectées, 21 ont pu être reliées directement à une plateforme pétrolière. Les 3 autres observations – 2 nappes d’hydrocarbures et une détection d’un autre polluant – ont toutes été observées sans qu’un navire ou une plate-forme se trouve à proximité. Toutes les observations ont été systématiquement signalées à l’État côtier compétent pour un suivi ultérieur, conformément aux procédures internationales.

Du pétrole provenant d’une plateforme de forage, tel qu’observé depuis l’avion de surveillance lors de la mission internationale TdH 2020. © IRSNB/UGMM

Suivi des mammifères marins

En 2020, l’IRSNB a effectué deux vols au-dessus des eaux belges pour déterminer la répartition et la densité des marsouins communs. De telles enquêtes sont également menées dans d’autres pays de la mer du Nord de manière standardisée afin d’obtenir des résultats pluriannuels qui donnent une idée de la dynamique de la population dans toute la partie sud et centrale de la mer du Nord. Les enquêtes saisonnières n’ont pu – en raison des restrictions imposées par Covid-19 – être réalisées que fin juin et début septembre. Bien que ces mois ne correspondent pas aux périodes où l’on trouve traditionnellement le plus grand nombre de marsouins dans nos eaux, un nombre considérable de marsouins a tout de même été repéré.

Fin juin, 34 marsouins ont été observés, et début septembre, 37. L’estimation résultante de la densité moyenne pour la partie belge de la mer du Nord était presque la même dans les deux enquêtes, respectivement 0,56 et 0,55 marsouins par km², soit un total estimé de 1900 marsouins. Trois phoques ont également été observés lors de la surveillance de juin, et 13 lors de la surveillance de septembre, le plus grand nombre de phoques jamais observé lors d’une surveillance belge des mammifères marins. Parmi ces phoques, il y avait au moins trois phoques gris adultes. Lors de l’enquête de septembre, un grand dauphin a également été observé dans la partie nord-ouest de nos eaux.