Le son est partout. Pas seulement sur la terre mais aussi dans les mers et les océans. Certains sons sont d’origine naturelle, mais les activités humaines ajoutent aussi au paysage sonore marin. Nous ne comprenons pas encore bien les types et la distribution de ces sons sous-marins, sans parler des effets qu’ils peuvent avoir sur la faune marine. Fin mai 2019, une station permanente d’enregistrement acoustique a été installée dans la partie belge de la mer du Nord. Cet accomplissement majeur s’inscrit dans le projet JOMOPANS, « Joint Monitoring Programme for Ambient Noise North Sea » (Programme Commun d’Observation du Son Ambiant Mer du Nord). Ce nouvel équipement aidera les scientifiques à comprendre comment les sons sous-marins sont distribués dans la mer du Nord.
Si vous pensiez que l’environnement sous-marin était un monde calme et serein, vous devriez peut-être le reconsidérer. Les sons sont omniprésents aussi dans l’environnement marin. Le son sous-marin peut provenir de sources naturelles (vagues, temps, animaux) ou anthropogéniques (transport, construction). Cependant, notre compréhension des effets de ces sons sur la faune marine est encore limitée. Dans les dernières années, l’introduction aux sons sous-marins dans un tel environnement a commencé à recevoir de l’attention politique et scientifique, et des systèmes de surveillance sont en train d’être installés.
Son impulsionnel
Toutefois, la plupart de l’effort de surveillance se concentre sur le son impulsionnel. Cette catégorie de bruits consiste en des sons de courte durée (comme des impulsions), largement non-désirés et anthropogéniques. Le battage de pieux pour la construction d’éoliennes off-shore, de sonars, et la destruction de munitions en mer sont les sources de sons impulsionnels les mieux connus. Ils sont potentiellement nocifs pour la faune marine. Une relocalisation temporaire de marsouins communs (Phocoena phocoena) a déjà été observée pendant des activités de battage de pieux, et les scientifiques ont pu avoir un aperçu des effets des sons impulsionnels sur les poissons. Mais pour comprendre l’impact complet sur ces organismes et sur d’autres organismes marins, une étude bien plus poussée est nécessaire. Le savoir grandissant donne lieu à des régulations. Par exemple, la législation belge prescrit déjà que le niveau de sons impulsionnels anthropogéniques ne doit pas dépasser le niveau auquel on observe des effets nocifs. Pour le battage de pieux, le seuil est actuellement défini à 185 dB à 750m de la source du son. Des mesures de réduction du son devraient être mises en place quand cette limite est dépassée.
Son continu
En revanche, notre compréhension des niveaux et des modèles spatio-temporels des sons ambiants continus dans le milieu marin est actuellement beaucoup moins développée. Ces bruits – généralement de basses fréquences – peuvent montrer une tendance à la hausse en raison de l’augmentation des activités humaines telles que la navigation, le dragage, l’extraction de sable, la pêche et la production d’énergie durable en mer. Les effets négatifs potentiels sur la faune marine peuvent être subtils et chroniques et sont donc plus difficiles à évaluer. La quantité limitée de données disponibles ne permet pas encore de rendre compte aux décideurs nationaux et internationaux.
Surveillance continue du son ambiant
Tout comme les sources de bruit, la transmission du son et la distribution d’espèces vulnérables sont des questions transnationales. Les obligations de rapport international des pays membres de l’UE en ce qui concerne la Directive Cadre Stratégie pour le Milieu Marin (DCSMM) encourage fortement le développement d’une approche locale qui respecte à la fois la surveillance et la méthodologie. La Belgique s’est engagée efficacement à contribuer à une telle approche internationale et à utiliser les résultats pour une évaluation nationale. Pour accomplir cela, l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique (IRSNB) a rejoint le projet JOMOPANS.
Dans ce projet, l’IRSNB est responsables (entre autres) de l’installation de la station permanente d’enregistrement acoustique dans la partie belge de la mer du Nord. La plateforme de Westhinder a été choisie comme localisation adaptée. Servant essentiellement comme plateforme de lumière électronique, elle joue désormais aussi un rôle important en tant que nœud du réseau de surveillance de l’Agence flamande de Services Maritimes et Côtiers. Fin mai 2019, la station d’enregistrement du son JOMOPANS a été ajoutée à cette plateforme. Les techniciens de l’Agence flamande de Services Maritimes et Côtiers et les plongeurs scientifiques de l’IRSNB ont pris soin respectivement des parties aériennes et sous-marines de l’installation. L’instrument surveillera continûment le son sous-marin ambiant généré à la fois par des causes naturelles et anthropogéniques. Regardez la vidéo illustrative!
Vers une gestion fondée sur la connaissance
« Le système d’enregistrement acoustique récemment installé délivrera des données en haute définition nécessaires pour décrire les types (niveau et fréquence) et la période des sons autour de la station belge d’enregistrement. » dit Alain Norro, plongeur scientifique de l’IRNSB. « Combiné avec les données produites par les autres stations JOMOPANS, cela nous permettra de commencer à comprendre comment le son sous-marin est distribué dans la mer du Nord. » A ce titre, la station Belge sera une partie essentielle du réseau, qui livrera les outils nécessaires aux scientifiques et aux responsables pour intégrer le son ambiant à leur estimation du statut environnemental de la mer du Nord. La prochaine étape sera d’évaluer l’efficacité de différentes options pour réduire le potentiel impact environnemental du bruit sous-marin ambiant sur le bassin de la mer du Nord.
JOPOMANS est un projet Interreg (Région de la mer du Nord) fondé par le Fonds Européen de Développement Régional de l’Union Européenne. Le projet consortium consiste en 11 partenaires de 7 pays (l’IRSNB étant le seul partenaire belge) et est coordonné par Rijkwaterstaat (Pays-Bas).