La tortue luth de Knokke est morte des suites d’un traumatisme aigu

Jusqu’à la découverte d’une tortue luth morte sur la plage de Knokke le 7 octobre 2023, on ne connaissait que trois échouages de cette espèce dans notre pays. L’autopsie de l’animal, qui a eu lieu le 9 octobre, montre que le malheureux animal était en bonne santé lorsqu’un traumatisme aigu mais inconnu a provoqué sa mort subite.

Tortue luth échouée morte sur la plage de Knokke, 7 octobre 2023 (© IRSNB/J. Haelters)

Le samedi matin 7 octobre 2023, des promeneurs ont trouvé rien de moins qu’une tortue luth (Dermochelys coriacea) morte sur la plage près du parc naturel du Zwin à Knokke, près de la frontière néerlandaise. Espèce exclusivement marine qui ne vient à terre que pour pondre, la tortue luth est aussi la plus grande espèce de tortue au monde (avec une longueur maximale de 2,5 m). Le malheureux animal de Knokke mesurait 1,73 m de long et était déjà en état de décomposition. La mort soit survenue probablement quelques jours avant qu’elle ne soit rejetée sur le rivage.

L’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique (IRSNB), chargé d’organiser l’étude des espèces marines protégées, a récupéré l’animal auprès des pompiers de Knokke après que ceux-ci l’aient retiré de la plage, en collaboration avec le service technique de la commune.

Tortue luth échouée morte sur la plage de Knokke, 7 octobre 2023 (© IRSNB/J. Haelters)

En mer du Nord ?

La tortue luth est une espèce dite cosmopolite, ce qui signifie qu’on la trouve dans le monde entier. Elle est surtout connue comme une espèce des mers chaudes, mais ce n’est que pour la ponte que les plages des mers tropicales et subtropicales sont importantes. En dehors de la saison de ponte, les tortues luth se trouvent également beaucoup plus au nord (jusqu’en Alaska et en Norvège) et au sud (jusqu’en Afrique du Sud et en Nouvelle-Zélande). Dans les eaux peu profondes de la mer du Nord, leur présence est très sporadique, mais elles peuvent s’y nourrir pendant les périodes où les méduses sont très abondantes.

Les méduses sont donc une explication possible de l’apparition de cette tortue luth dans le sud de la mer du Nord. Ces dernières semaines, les rhizostomes (Rhizostoma pulmo) ont été particulièrement abondantes dans nos eaux, une espèce de méduse qui figure au menu de la tortue luth et qui atteint son apogée dans nos eaux d’août à octobre. Il n’est pas inconcevable que la tortue luth de Knokke ait suivi cette source de nourriture dans la mer du Nord.

Quatre échouages dans notre pays

Dans nos régions, la tortue luth est une grande rareté. Jan Haelters (IRSNB), coordinateur du réseau d’échouage et expert en mammifères marins, donne un aperçu de la situation : « On ne connaît que trois échouages de tortues luth en Belgique. Les échouages précédents datent de 1988, 1998 et 2000. En outre, seules quelques observations de tortues luth vivantes dans les eaux belges sont connues : une en 2018, deux en 2019 et une en 2020. Cette dernière a été trouvée entre Ostende et Middelkerke dans les filets d’un pêcheur de crevettes, et a pu être ramenée vivante par-dessus bord. »

Il semble que le nombre de cas dans nos eaux augmente, mais avec un si petit nombre, il est dangereux de tirer une telle conclusion. En effet, le nombre d’observateurs potentiels et le flux de données ont également considérablement augmenté grâce à la forte connectivité numérique de notre monde actuel. Il n’est pas non plus possible d’établir un lien avec le réchauffement climatique avec un si petit nombre d’observations.

Autopsie

L’autopsie de la tortue luth a eu lieu le lundi 9 octobre au matin à la faculté de médecine vétérinaire de l’université de Gand, dans le cadre d’une collaboration entre les universités de Gand et de Liège. Elle a révélé qu’il s’agissait d’une femelle de 247 kg. Les restes de rhizostomes dans l’œsophage montrent que l’animal était en train de manger lorsqu’elle est morte. Un petit morceau de plastique a été trouvé dans l’intestin, mais la quantité était trop faible pour causer des problèmes. Il est bien connu que les animaux qui mangent des méduses se trompent parfois et confondent le plastique flottant dans l’eau avec des méduses.

Tout semble indiquer que la tortue luth était en bonne santé lorsqu’elle est morte subitement. Bien que l’animal ne présente aucun signe extérieur de traumatisme aigu, de nombreuses hémorragies ont été observées à l’intérieur. Cela indique une mort soudaine due à un événement traumatique, mais la cause exacte de ce traumatisme n’est pas claire.

La tortue luth sur la table d’autopsie (© IRSNB/J. Haelters)
Intérieur de l’œsophage avec des restes de rhizostomes (© IRSNB/J. Haelters)
Morceau de plastique du système digestif (© IRSNB/J. Haelters)
Détail de la tête (© IRSNB/J. Haelters)