La toundra de Yamal se trouve juste à l’est de la zone où nichent la plupart des Cygnes de Bewick hivernant dans la région de la Mer du Nord.
Lors de la prospection de la zone réalisée en juillet 2014 afin d’étudier l’écologie de la reproduction et de la migration de la Bernache à cou roux et du Faucon pèlerin, nous avions remarqué de nombreux Cygnes de Bewick migrant vers le nord, très probablement pour rejoindre des sites de mue. Dans l’intervalle, des observations réalisées depuis un hydravion dans la région de la baie de Baydaratskaya, sur la côte occidentale de la péninsule de Yamal, ont permis de repérer plusieurs bandes de cygnes non-nicheurs ainsi de nombreux couples reproducteurs. La péninsule de Yamal semble donc être une région adéquate pour organiser une expédition visant à baguer des Cygnes de Bewick. Par ailleurs, il s’avère que le gouvernement de la Région Autonome Yamal Nenets est soucieux de promouvoir la science et la conservation du patrimoine naturel.
Aussitôt dit, aussitôt fait, en route vers la baie de Baydaratskaya et en particulier l’estuaire de la rivière Youribey ! La mission dans la toundra a été menée du 07/08/2015 au 25/08/2015. Elle s’est déroulée sur deux niveaux : depuis les airs grâce à un hydravion mono-moteur et depuis le sol, ou plutôt l’eau, avec un bateau hors-bord. Trois ornithologues provenant de Russie, de Grèce et de Belgique ont participé à la mission, accompagnés d’un naturaliste pilote d’hydravion.
Le camp a été établi à 25 km en amont de l’ estuaire de la Yuribey , précisément à 68.54.15 N – 69.27.57 E. Le site est une base logistique, composé d’un dizaine de cabanes en bois et permet de proposer à la vente des biens essentiels aux Nenets, des éleveurs nomades de rennes.
Un grand total de 1925 km ont été parcourus en hydravion afin d’étudier la distribution des Cygnes de Bewick. Au total, 1059 cygnes ont été comptés y compris 64 couples nicheurs. Aucun grand groupe de cygnes en mue n’a été détecté, le maximum étant de 150 individus. Mais l’observation des Cygnes de Bewick n’était pas notre seul objectif ! Nous avons également très intensivement recherché les Oies naines Anser erythropus. Cette espèce connaît un dramatique recul au cours de ces dernières années et est donc réellement menacée d’extinction. L’Oie naine a un plumage très semblable à celui de l’Oie rieuse Anser albifrons qui est par contre très abondante. Toutes deux nichent dans la toundra, l’Oie naine montrant cependant une prédilection pour les zones de toundra boisée. Autrefois abondante jusque dans le nord de la Scandinavie, la population ne compte actuellement plus dans cette région qu’aux alentours de 150 individus. Ces dernières Oies naines scandinaves sont particulièrement bien étudiées et il s’avère qu’elles hivernent en majorité dans … le delta de l’Evros.
Incroyable delta de l’Evros !
L’expédition réalisée dans la péninsule de Yamal a bénéficié de l’appui du Gouvernement de la Région Autonome Yamal Nenets et de l’Accord sur la Conservation des Oiseaux d’Eau migrateurs d’Afrique-Eurasie (AEWA) – PNUE.