La science et l’industrie s’associent pour étudier les défis environnementaux posés par les panneaux solaires flottants en mer

Pour répondre aux besoins croissants de notre société en matière d’énergie renouvelable, le potentiel de l’énergie solaire offshore est également exploré aujourd’hui. Cependant, la technologie doit encore être développée et on doit veiller à ce que cela se fasse dans le respect de l’environnement marin. Dans le projet EcoMPV, les développements technologiques et le suivi de l’impact vont de pair. En travaillant ensemble dans le cadre de ce projet pilote, la science et l’industrie apprennent à comprendre l’impact des panneaux solaires flottants sur l’environnement offshore et peuvent éviter ou atténuer leurs effets dans la mesure du possible dès le début d’initiatives commerciales potentielles. Grâce aux connaissances acquises, les impacts positifs peuvent être directement renforcés. L’installation de trois modules expérimentaux en mer s’est achevée le 28 juin.

Le besoin croissant de production locale d’énergie renouvelable et l’accélération de la transition énergétique, combinés à la rareté des terres, conduisent les décideurs politiques, l’industrie mais aussi les scientifiques à s’intéresser de plus en plus aux sites offshore. À ce jour, la production d’énergie renouvelable en mer est principalement assurée par des parcs éoliens. La Belgique est devenue l’un des leaders internationaux dans ce domaine.

Parallèlement, on s’intéresse de plus en plus aux possibilités de produire de l’énergie solaire en mer. La complémentarité des technologies éoliennes et solaires a été confirmée dans le monde entier. Étant donné que les gouvernements encouragent de plus en plus l’utilisation multiple de l’espace marin et que les infrastructures de réseau en mer présentent un bon potentiel d’utilisation combinée, l’intégration d’installations solaires flottantes dans les parcs éoliens en mer actuels et futurs offre la possibilité d’ajouter de grandes quantités d’énergie renouvelable supplémentaire. Cependant, la technologie et les connaissances sur les impacts environnementaux de l’énergie solaire flottante n’en sont qu’à leurs balbutiements.

Impression d’artiste de la conception de SeaVolt pour l’énergie solaire flottante en mer

Défis environnementaux

Dans le cadre du projet EcoMPV (Eco-designing Marine Photovoltaic Installations), des scientifiques et des partenaires industriels collaborent pour approfondir les connaissances sur les défis environnementaux posés par les installations photovoltaïques flottantes en mer, dans le but de trouver des solutions techniques pour atténuer les impacts indésirables et maximiser les impacts positifs.

Les lacunes en matière de connaissances seront comblées en ce qui concerne (1) la modification du champ lumineux sous-marin, l’hydrodynamique, la biogéochimie pélagique et la production primaire, (2) la fourniture d’habitats artificiels à la faune et aux poissons colonisateurs, et (3) les effets sur les flux et le stockage du carbone. En outre, des conseils sur la conception écologique des installations photovoltaïques en mer seront formulés, ce qui ouvrira la voie à l’octroi de licences environnementales.

Préparer les premières installations photovoltaïques flottantes

Les 24 mai, 28 mai et 28 juin 2023, des scientifiques de l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique (IRSNB) ont installé trois « modules littoraux » expérimentaux au bord du parc éolien offshore Mermaid, dans la zone énergétique offshore opérationnelle de Belgique. Ces modules flottants sont équipés de plaques de colonisation en différents matériaux afin d’étudier le potentiel de colonisation de la faune marine et la fourniture d’habitat des structures flottantes artificielles, y compris les systèmes photovoltaïques flottants en mer.

Installation d’un ‘module littoral’ expérimental au bord du parc éolien offshore Mermaid le 24 mai 2023 avec le RV Belgica. (© IRSNB/MARECO)

Les modules ont été conçus et développés par Jan De Nul Group en collaboration avec l’IRSNB, et avec le soutien de l’EMBRC Belgium (European Marine Biological Resource Centre). L’installation a été réalisée à bord du RV Belgica et du Zeetijger et les modules resteront dans l’eau pendant environ un an et demi. Les modules seront contrôlés régulièrement afin de suivre la colonisation.

L’emplacement des tests expérimentaux a été choisi pour être aussi similaire que possible à la zone Princess Elisabeth (ZPE), qui a été désignée comme une nouvelle zone pour la production d’énergie renouvelable en mer dans le plan d’aménagement des espaces marins 2020-2026. Bien que la ZPE reste principalement axée sur l’énergie éolienne en mer, la combinaison avec des panneaux solaires flottants semble prometteuse.

Vincent Van Quickenborne, ministre de la mer du Nord : « Avec EcoMPV, des mesures importantes sont prises pour évaluer correctement l’impact environnemental des panneaux solaires flottants. C’est important. On estime que le potentiel des panneaux solaires flottants est élevé. Si nous voulons les utiliser plus tard à l’échelle commerciale, il est nécessaire de tenir compte de leurs effets sur l’environnement marin afin de les éviter ou de les atténuer autant que possible. La Belgique montre ainsi une fois de plus que l’économie et l’écologie vont de pair ».

Tinne Van der Straeten, ministre de l’énergie : « Dans notre pays, nous avons la matière grise et la volonté de trouver des solutions aux défis de l’avenir. Avec le Fonds de transition énergétique, nous voulons donner un coup de fouet à ces solutions. Le gouvernement fédéral soutient 21 projets de premier plan, dont EcoMPV. Les panneaux solaires flottants en mer font partie de la solution pour faire de notre mer du Nord la plus grande centrale électrique verte d’Europe. EcoMPV montre une fois de plus que nous pouvons compter sur le savoir-faire et l’expertise belges pour ces solutions. »

À propos d’EcoMPV

EcoMPV est financé par le Fonds de transition énergétique du SPF Économie, DG Énergie, a démarré en novembre 2022 et durera trois ans. Le projet est coordonné par l’équipe de recherche ‘Marine Ecology and Management’ de l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique (IRSNB), avec l’Université de Gand comme partenaire scientifique et Tractebel, Jan De Nul Group et DEME Group comme partenaires industriels.

Les objectifs d’EcoMPV sont les suivants :

  • Approfondir les connaissances sur les effets des structures photovoltaïques flottantes sur l’hydrodynamique et la productivité du phytoplancton;
  • Explorer l’habitat que les structures flottantes fournissent à la vie marine, y compris la faune colonisatrice et l’attraction pour les poissons;
  • Décrire les effets de la faune colonisatrice (encrassement) des structures flottantes sur les sédiments environnants, y compris l’enfouissement et la séquestration (stockage) du carbone;

Contribuer à la conception de systèmes photovoltaïques flottants respectueux de la nature, sur la base des résultats des objectifs précédents, afin de garantir la durabilité écologique de ces systèmes.

Installation d’un ‘module littoral’ expérimental au bord du parc éolien offshore Mermaid le 24 mai 2023 avec le RV Belgica. (© IRSNB/MARECO)

Le Fonds de transition énergétique a vu le jour en 2017, visant à soutenir la recherche, le développement et l’innovation en matière de transition énergétique. Au total, 51 propositions ont été reçues suite à l’appel à projet de novembre 2022. Parmi elles, 21 ont été sélectionnées pour bénéficier d’une subvention. Grâce à ce fonds, l’expertise des entreprises et des start-ups sera mise à profit pour accélérer la transition énergétique.

Multiples rejets en mer du Nord ces dernières semaines

Ces dernières semaines, l’avion de surveillance de l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique (IRSNB) a documenté un nombre remarquable de pollutions en mer. Celles-ci vont à l’encontre de la tendance de ces dernières années, surtout en ce qui concerne la pollution par les hydrocarbures. Ces observations illustrent la grande importance de la surveillance aérienne de la mer.

Le 20 juin, un navire de pêche a été pris en flagrant délit de rejet d’hydrocarbures dans la zone économique exclusive belge.

Le 27 juin, une grande nappe d’hydrocarbures a été observée sans être liée à un pollueur. Il s’agit de l’une des plus grandes nappes d’hydrocarbures des 15 dernières années qui ne résulte pas d’un accident dans les eaux belges. Le volume minimal déversé a été estimé à 1,6 tonne d’hydrocarbures.

La grande nappe d’hydrocarbures documentée le 27 juin 2023 (© IRSNB/UGMM)
Détail de la grande nappe d’hydrocarbures documentée le 27 juin 2023 (© IRSNB/UGMM)

Un jour plus tard, deux navires ont été observés en train de rincer des citernes, ce qui a entraîné le déversement d’huile végétale et de dérivés dans l’eau. La légalité de ces opérations devra être déterminée par une inspection portuaire. Le rejet d’un des deux navires a été détecté dans la matinée par un satellite de l’Agence européenne pour la sécurité maritime (EMSA). Lorsque l’avion a contrôlé le navire quelques heures plus tard, il s’est avéré que le rinçage du pétrolier était toujours en cours.

Détail de la contamination trouvée le 28 juin 2023 (© IRSNB/UGMM)

Dans aucun de ces cas, il n’y a eu de risque que les contaminants s’échouent sur la côte.

Contre tendance

Les nappes d’hydrocarbures observées ces derniers jours contrastent fortement avec la tendance générale qui se dégage des résultats de 30 années de surveillance de l’air en Belgique. Ceux-ci montrent que la pollution marine par les hydrocarbures est devenue un phénomène rare au cours de la dernière décennie. Le nombre de rejets d’autres substances liquides nocives (SLN) a connu une légère augmentation ces dernières années ; 2022 étant l’année où le nombre de polluants SLN observés par heure de vol a été le plus élevé depuis le début des observations en 1991. Bien que la plupart des rejets de ce dernier type soient probablement légaux et conformes aux normes internationales de rejet, il s’agit néanmoins de fluides qui peuvent être nocifs pour l’environnement marin à des degrés très divers.

Les observations faites ces dernières semaines ne doivent pas nécessairement nous inquiéter, car il se peut que ce soit une coïncidence que plusieurs contrevenants aient été actifs dans les eaux belges de la mer du Nord au cours d’une courte période. Toutefois, ces résultats montrent qu’il faut continuer à surveiller étroitement et à appliquer la réglementation, tant en mer qu’à terre. Ainsi, même dans les airs, une plateforme de surveillance rapidement opérationnelle reste une nécessité absolue.

DEHEAT 2023/03 – Hvalfjördur – À la recherche de l’eau

26 juin 2023 – Le RV Belgica est en pleine effervescence ce matin, alors que le navire quitte le port de Reykjavik pour se rendre à sa première station d’échantillonnage. La route n’est pas longue, car les premiers jours de l’expédition se dérouleront dans un fjord situé juste au nord de la capitale islandaise. Le fjord en question est le Hvalfjördur, littéralement traduit par « fjord des baleines ». Il faut moins de deux heures pour arriver à la station HF3, qui a le privilège d’être la première à être échantillonnée. Ce premier prélèvement est toujours un moment crucial, car il est certainement préférable pour le moral de commencer par un succès. Une seule chose est sûre pour l’instant : le temps ne sera certainement pas un rabat-joie ! L’eau est calme, le vent absent et le soleil agréable.

Le RV Belgica navigue vers Hvalfjördur.

La campagne DEHEAT commence par le déploiement du CTD, qui deviendra le point de départ habituel des opérations sur chaque site d’échantillonnage. CTD signifie conductivité, température et profondeur, des paramètres mesurés par des capteurs intégrés dans une structure qui consiste en 24 bouteilles Niskin placées en rosette. Par souci de simplicité, nous appellerons l’ensemble « CTD ».

La rosette contenant 24 bouteilles Niskin et les capteurs CTD quitte le hangar CTD du RV Belgica.

La construction CTD est un outil océanographique essentiel. Lorsque le CTD descend dans la colonne d’eau jusqu’à la surface du fond, la profondeur et les changements de température, de salinité et de teneur en oxygène de l’eau peuvent être suivis en temps réel sur un ordinateur. En fonction de l’évolution de ces paramètres, les scientifiques décident à quelle profondeur des échantillons d’eau seront prélevés. C’est là qu’interviennent les bouteilles Niskin, qui peuvent être fermées à distance, une à une, d’un simple clic de souris. Cela se produit pendant le voyage de retour de la rosette vers la surface.

Contrôle en temps réel de la température, de la salinité et de la teneur en oxygène pour déterminer la profondeur à laquelle les différentes bouteilles Niskin sont fermées.

Lors du premier voyage du CTD vers le fond et de sa remontée, le ‘wetlab’ (laboratoire humide) qui abrite l’ordinateur sur lequel les paramètres du CTD sont contrôlés a été particulièrement occupé. Tout le monde voulait être personnellement témoin des toutes premières données apparues au cours de l’expédition DEHEAT. Dans les jours qui suivent, ce moment sera beaucoup moins fréquenté. Cela n’a bien sûr rien à voir avec une perte d’intérêt, mais est entièrement dû au fait qu’aucune autre activité n’avait encore commencé pendant le tout premier CTD. Dans les stations suivantes, la situation sera très différente, et le calendrier des activités des différents scientifiques sera donc lui aussi de plus en plus différent.

Un wetlab très peuplé pendant les premières mesures CTD.

Par la suite, ce seront principalement quelques visages habituels qui seront présents à chaque CTD, prenant les décisions concernant la collecte d’échantillons d’eau et la fermeture des bouteilles Niskin. Outre Sebastiaan van de Velde, scientifique en chef de DEHEAT, l’équipe CTD permanente se compose de Kate, Lei et Felipe. Ce sont également eux qui prélèveront éventuellement des échantillons du contenu des bouteilles Niskin, de différentes manières et à différentes fins.

L’administration est assez lourde, car chacun à bord veut sa part d’eau, et l’une des eaux s’avère ne pas être l’autre … Des échantillons doivent être prélevés pour déterminer l’alcalinité, le carbone inorganique dissous, les nutriments, le silicium, les métaux, l’oxygène, le magnésium et le strontium, la salinité, … et tous ces échantillons sont nécessaires dans des volumes différents, doivent être stockés dans des conteneurs différents, nécessitent un traitement différent et doivent être transportés à différents endroits du navire. Pour compliquer encore les choses, certains échantillons ne doivent être prélevés que dans le fjord, ou plus tard seulement en haute mer, ou seulement à certaines profondeurs, et différents participants à l’expédition viennent avec des bouteilles de grande taille ou même plus grandes pour obtenir également leur part d’eau …

Kate Hendry a la tâche importante d’assurer le suivi des données, non seulement pour l’échantillonnage CTD, mais aussi pour presque tous les échantillons prélevés au cours de l’expédition. Kate est climatologue océanique, océanographe chimiste ou biogéochimiste au British Antarctic Survey. Elle fait partie du comité scientifique et du comité directeur de DEHEAT et a également été désignée comme deuxième responsable scientifique de l’expédition.

Kate Hendry (British Antarctic Survey) est co-responsable scientifique et gestionnaire des données générales lors de l’expédition DEHEAT avec le RV Belgica.

 Kate explique ce que cela signifie : « Le travail de co-responsable scientifique consiste à vérifier le bon sens et à donner son avis au responsable scientifique. Lors d’une expédition comme celle-ci, il y a beaucoup de choses à penser et à surveiller, et de nombreuses décisions importantes doivent être prises. Mon travail consiste à proposer des idées, des suggestions, des alternatives et des solutions à tous les problèmes. Mais pour être honnête, Sebastiaan fait un excellent travail, donc pour moi ce n’est pas trop grave, tout se passe bien ».

En ce qui concerne la tâche consistant à tout suivre, elle ajoute : « Outre la science, je me concentre sur la gestion des données, je m’occupe de la paperasserie et je veille à ce que tout soit archivé. La dernière chose que l’on souhaite, c’est que des documents importants se perdent, c’est pourquoi je m’assure que tout est scanné et archivé. Cela s’avère parfois utile, même des mois ou des années après une campagne sur le terrain, si quelque chose déroute ou intrigue les chercheurs, les obligeant à revenir aux journaux originaux vitaux ».

Revenons maintenant à l’échantillonnage CTD. Felipe Sales de Freitas, océanographe chimiste/ géochimiste et chercheur postdoctoral à l’Université Libre de Bruxelles, est directement impliqué dans le projet DEHEAT, fournissant ce que l’on peut considérer comme « l’échantillonnage CTD à petit volume » pour toute une série de cibles, dont la plupart nécessitent que l’eau soit filtrée des bouteilles Niskin.

« Mais d’abord, nous devons accomplir le rituel sacré qui consiste à rincer chaque récipient ou outil trois fois avec l’eau que nous allons échantillonner », explique-t-il en riant. « Ensuite, nous pressons l’eau dans des seringues et des filtres jusqu’à ce que nos pouces soient complètement à l’étroit. »

Felipe explique son rôle dans l’expédition DEHEAT Belgica comme suit : « Dans cette expédition, je suis essentiellement une paire de mains supplémentaire dans diverses actions d’échantillonnage en raison de mon expérience dans l’échantillonnage sur le terrain et l’analyse. Plus tard, j’utiliserai une grande partie des données issues du carottage des sédiments et de l’analyse de l’eau pour la modélisation géochimique de DEHEAT ».

Felipe Sales de Freitas (ULB) pendant le traitement des échantillons d’eau du CTD.

Lei Chou, quant à elle, traîne de grands récipients entre les bouteilles Niskin et un système de filtration plus sophistiqué qu’elle a apporté elle-même et qui est mieux adapté au filtrage de plus grands volumes. Biogéochimiste marin et professeur émérite à l’Université libre de Bruxelles, elle reste active et impliquée dans la recherche et la formation des étudiants.

Lei a eu très peu de temps pour se préparer à l’expédition DEHEAT, mais elle en tire le meilleur parti : « On m’a proposé une couchette sur le RV Belgica quelques semaines seulement avant le début de l’expédition, une place s’étant soudainement libérée en raison de l’annulation d’un autre participant. J’ai dû faire vite et envoyer deux valises de matériel à Reykjavik car le Belgica avait déjà quitté son port d’attache de Zeebrugge. En effet, je voulais profiter de l’occasion pour collecter des échantillons supplémentaires pour les matières en suspension, les nutriments, les métaux et la teneur en chlorophylle afin de compléter le plan DEHEAT déjà très ambitieux ».

Lei Chou (ULB) lors du traitement des échantillons d’eau du CTD.

Nous pouvons être sûrs que l’eau de mer islandaise aura beaucoup moins de secrets après l’analyse des échantillons de DEHEAT.

DEHEAT 2023/02 – Se préparer pour l’Islande

25 juin 2023, 17h00 – Il serait faux de prétendre que les préparatifs d’une expédition en mer commencent le jour de l’embarquement des participants. En réalité, les préparatifs durent depuis longtemps, depuis la conceptualisation, la rédaction de la proposition de projet, la préparation et la soumission de la demande d’utilisation du navire choisi, jusqu’à la préparation pratique de l’expédition.

Cette dernière étape est une tâche titanesque, surtout pour une expédition à caractère international comme l’expédition DEHEAT. En effet, du matériel a dû être envoyé de différents endroits d’Europe à Zeebrugge et Reykjavik, tout a dû trouver une place logique à bord, et toute une série d’équipements d’échantillonnage et de laboratoires ont également dû être préparés et mis en place pour pouvoir être utilisés dès le début de l’expédition proprement dite. Un certain nombre de scientifiques étaient déjà montés à bord à Galway à cette fin, afin d’effectuer les préparatifs nécessaires pendant le voyage de l’Irlande à l’Islande.

Mais aujourd’hui, le grand jour est enfin arrivé : tous les scientifiques qui participeront à l’expédition DEHEAT en Islande jettent leur premier regard sur le RV Belgica, le navire à bord duquel ils passeront 17 nuits et donneront le meilleur d’eux-mêmes pendant les jours qui suivront.

RV Belgica dans le port de Reykjavik, Islande, 24 juin 2023 (© IRSNB/K. Moreau)

Ils sont 22, issus d’universités et d’instituts de Belgique, du Royaume-Uni, d’Allemagne, du Danemark et de Suède, mais ils représentent bien plus de nationalités différentes. Certains ont déjà travaillé ensemble, mais il y a aussi beaucoup de nouveaux visages.

Ce n’est pas un luxe superflu que de compiler un aperçu des photos avec les noms, ce qui permet aussi à l’équipage habituel du RV Belgica de savoir immédiatement qui est qui. L’aperçu est accroché dans le mess, pratiquement le seul endroit à bord où tout le monde se rend plusieurs fois par jour. Tout le monde le voit donc régulièrement et peut rapidement associer des noms aux nombreux visages !

Le désordre scientifique de l’aventure DEHEAT dans les eaux islandaises avec le RV Belgica (© IRSNB/K. Moreau)

Le départ n’est prévu que demain matin, mais la première soirée à bord est immédiatement mise à profit. Tout d’abord, il y a l’indispensable briefing de sécurité donné par le chef Sam, où tout le monde est informé des différentes procédures de sécurité et du comportement attendu à bord. Nous avons également tous dû enfiler une combinaison de sauvetage, ce qui a parfois donné lieu à des scènes hilarantes.

Sebastiaan, le scientifique en chef de DEHEAT, n’échappe pas non plus à la mise en place de la combinaison de sauvetage 😉 (© IRSNB/K. Moreau)

Ensuite, l’ordre du jour scientifique. Sebastiaan, scientifique en chef, résume la mise en place du projet DEHEAT, en insistant évidemment sur le rôle crucial de l’expédition RV Belgica. Le déroulement et les activités de la première journée d’échantillonnage sont également passés en revue.

Discussion détaillée des plans pour la première journée d’échantillonnage de l’expédition (© IRSNB/K. Moreau)

Le pont, mais aussi les laboratoires du RV Belgica, seront entièrement occupés pendant cette expédition. Une bonne organisation est indispensable pour que tout le monde puisse travailler efficacement. Astrid, responsable des laboratoires, prend donc la parole pour expliquer les procédures et prendre les bonnes dispositions.

Astrid, responsable du laboratoire, explique les procédures de laboratoire (© IRSNB/K. Moreau)

Assez parlé de la première soirée ! Profitons tous de la dernière soirée qui, nous en sommes sûrs, se déroulera dans un environnement stable.

DEHEAT 2023/01 – Utiliser l’océan pour réduire la concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère

Première mission du RV Belgica dans le Grand Nord

Le 26 juin 2023, une équipe internationale de scientifiques a donné le coup d’envoi de la première mission arctique du nouveau navire de recherche océanographique belge RV Belgica. Ils ont embarqué à Reykjavik, capitale de l’Islande, et passeront 16 jours dans les fjords et sur le plateau continental islandais afin d’étudier les possibilités de réduire la concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère en favorisant l’altération des silicates dans l’océan. Ce processus pourrait contribuer à contrer activement le réchauffement climatique actuel.

RV Belgica (© Freire Shipyard)

Le changement climatique est l’un des plus grands défis mondiaux du 21e siècle et nécessite d’urgence une action ambitieuse, transformatrice et collective pour limiter le réchauffement de la planète. En 2015, les représentants de 196 pays se sont réunis lors de la conférence des Nations unies sur le climat à Paris et ont signé un accord historique visant à limiter l’augmentation de la température moyenne mondiale à moins de 2 degrés Celsius par rapport aux niveaux préindustriels.

Cependant, les émissions de dioxyde de carbone (CO2) continuent d’augmenter et les concentrations atmosphériques ont atteint des niveaux sans précédent depuis au moins 800 000 ans. L’humanité est arrivée à un point où la prévention des émissions de dioxyde de carbone et d’autres gaz à effet de serre dans l’atmosphère – « l’atténuation conventionnelle » – n’est plus suffisante pour atteindre l’objectif ambitieux. Nous devons également éliminer activement le dioxyde de carbone de l’atmosphère à l’aide de technologies à émissions négatives pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris de 2015.

Amélioration de l’altération des silicates

Une approche prometteuse des technologies d’émissions négatives est l’amélioration de l’altération des silicates (Enhanced Silicate Weathering). Ce processus tire parti de l’altération naturelle des minéraux silicatés, où la dissolution des silicates consomme le dioxyde de carbone de l’atmosphère.

Le concept d’altération marine des silicates consiste à répandre des minéraux silicatés sur les fonds marins des mers côtières. Des expériences récentes ont montré que l’altération pouvait être accélérée de cette manière. L’idée est que la disponibilité accrue des silicates, qui se traduit par une alcalinité plus élevée des océans (une plus grande capacité de l’eau à contrer l’acidification), améliorera l’absorption du dioxyde de carbone, réduisant ainsi les concentrations dans l’atmosphère.

DEHEAT

D’autre part, on ne sait pas si les taux d’altération élevés observés dans les expériences se produisent réellement dans les environnements naturels et quelle serait l’efficacité du processus d’extraction du dioxyde de carbone dans ces environnements. Pour lever ces incertitudes, un groupe de chercheurs de l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique (IRSNB), de l’Université d’Anvers et de l’Université libre de Bruxelles ont uni leurs forces dans le cadre du projet « DEHEAT – Natural analogues and system-scale modelling of marine enhanced silicate weathering » (Analogues naturels et modélisation à l’échelle du système de l’altération marine des silicates).

« Nous voulons étudier pour la première fois la faisabilité et l’efficacité de l’altération des silicates dans des conditions marines en utilisant l’océan côtier comme un réacteur biogéochimique naturel à grande échelle », explique Sebastiaan van de Velde, coordinateur de DEHEAT à l’Université d’Anvers et à l’IRSNB. « Une deuxième question cruciale concerne les effets secondaires possibles sur les écosystèmes marins, qu’ils soient positifs ou négatifs », ajoute-t-il.

Avec RV Belgica vers l’Islande

Pour combler ces lacunes critiques, l’équipe DEHEAT a mis sur pied une expédition scientifique spécialisée à bord du nouveau navire de recherche belge RV Belgica afin de quantifier la géochimie et la minéralogie des sédiments à un endroit qui sert d’analogue naturel pour l’altération améliorée des silicates : le plateau continental de l’Islande, qui est riche en basalte. Le basalte est une roche volcanique dont la teneur en silice et la vitesse d’altération conviennent aux recherches envisagées. L’Islande est donc un endroit idéal pour atteindre les objectifs de DEHEAT.

Sites d’échantillonnage DEHEAT autour de l’Islande pendant l’expédition Belgica 2023 (© Google Maps 2023 – TerraMetrics 2023, DEHEAT)

L’équipe, dirigée par Sebastiaan van de Velde et renforcée par l’expertise scientifique de collègues et d’équipements de l’Université de Gand, du British Antarctic Survey (Royaume-Uni), de l’Université de Bonn (Allemagne), de l’Université du Danemark du Sud (Danemark) et de l’Université de Göteborg (Suède), a embarqué sur le RV Belgica le lundi 26 juin à Reykjavik, la capitale islandaise. Ils passeront 16 jours dans les fjords et sur le plateau continental islandais, avant de rentrer à Reykjavik le 11 juillet 2023.

Au cours de l’expédition, l’équipe internationale et interdisciplinaire prélèvera des échantillons d’eau, forera le fond marin de l’Islande et mesurera les taux d’altération des sédiments, mais appliquera également des modèles informatiques pour simuler les taux d’altération du fond marin autour de l’Islande. Les données recueillies seront ensuite utilisées pour une application virtuelle à grande échelle de l’altération améliorée des silicates dans la mer du Nord belge à l’aide du modèle COHERENS, qui est conçu pour un large éventail d’applications dans les zones côtières et sur le plateau continental et dont le développement est dirigé par les chercheurs de l’IRSNB.

Lors des briefings quotidiens dans la salle de conférence du RV Belgica, Sebastiaan van de Velde (au centre, à l’arrière), chercheur principal du projet DEHEAT, évalue le travail de la journée et informe tous les scientifiques des actions d’échantillonnage et des expériences prévues pour le lendemain.

Une première dans le Nord

La capacité de l’équipe scientifique à mener à bien cette mission tient au fait que le nouveau navire de recherche Belgica est équipé pour une telle recherche interdisciplinaire et dispose d’une autonomie qui lui permet de rester en mer sans interruption pendant une période suffisamment longue. Dès la conception du nouveau RV Belgica, l’un des principaux objectifs était de mettre les eaux arctiques à la portée de la recherche belge et européenne. Dans ce contexte, la documentation et la recherche sur le changement climatique et le développement de mesures d’atténuation du changement climatique étaient des objectifs importants. Pour permettre des opérations au bord de la banquise pendant la saison estivale, le RV Belgica dispose même d’un renforcement léger pour la glace.

Le voyage nordique du RV Belgica vers l’Islande n’est pas un voyage isolé. En effet, le navire a déjà quitté son port d’attache de Zeebruges le 6 juin et a d’abord terminé une expédition dirigée par le Renard Centre of Marine Geology de l’Université de Gand, qui étudiait les processus sédimentaires (passés et présents) au large de la côte sud-ouest de l’Irlande, notamment dans la zone des monticules du Belgica (montagnes sous-marines aux flancs abrupts découvertes avec le Belgica précédent). Après une brève escale à Galway, en Irlande, et un transit vers Reykjavik, la partie DEHEAT de l’aventure internationale a commencé. Le RV Belgica se rendra ensuite au Groenland où une autre équipe scientifique embarquera, dirigée par le groupe de recherche en biologie marine de l’université de Gand. Ils étudieront comment le changement climatique, et plus particulièrement la fonte des glaciers, affectera la dynamique du carbone, les communautés biologiques et le réseau alimentaire dans les fjords du Groenland, un écosystème marin typique de l’Arctique (projet CANOE). Le retour du RV Belgica à Zeebrugge est prévu pour le 13 août.

 

DEHEAT (ainsi que CANOE) est financé par la Politique Scientifique Fédérale (BELSPO) en tant que bénéficiaire d’un appel spécifique destiné à donner un élan au lancement de la recherche sur le nouveau RV Belgica et à permettre aux chercheurs d’apprendre à connaître le navire et son potentiel. DEHEAT se déroule du 15 décembre 2021 au 15 mars 2026.

De plus amples informations sur le RV Belgica peuvent être consultées sur les sites web du navire chez l’IRSNB (y compris les positions en direct et les images de la webcam) et BELSPO. Le navire et ses activités scientifiques peut également être suivi sur Facebook et Twitter.

Surveillance aérienne de la mer du Nord en 2022

En 2022, l’équipe de surveillance aérienne de l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique a effectué 244 heures de vol au-dessus de la mer du Nord. 19 cas de pollution marine opérationnelle par des navires ont été observés dont deux contenant des hydrocarbures et 17 des autres substances nocives. Des taux de soufre suspects ont été relevés dans les panaches de 47 navires ainsi que des taux d’azote suspects pour 35 navires. L’avion a également participé avec succès à une surveillance coordonnée au niveau international des installations pétrolières et gazières et à une mission internationale concernant la détection de pollutions chimiques. En outre, deux recensements saisonniers des mammifères marins ont été réalisés. Enfin, l’avion a également effectué quelques vols sur appel (“on call flight”) à des fins, entre autre, de soutien à une opération de sauvetage de transmigrants en mer. Les infractions à la navigation, l’entrée dans des zones interdites et la navigation sans le système d’identification automatique obligatoire ont été davantage signalées en 2022 qu’auparavant.

L’avion de surveillance belge en action au-dessus du navire P902 POLLUX durant un exercice national de lutte contre la pollution POLEX. (© Composante Marine de la Défense)

Dans le cadre du programme national de surveillance aérienne, 244 heures de vol ont été effectuées au-dessus de la mer du Nord en 2022. Ce programme est organisé par le service scientifique de l’UGMM (Unité de gestion du Modèle Mathématique de la mer du Nord) de l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique, en collaboration avec la Défense.

La majorité des heures de vol ont constitué des vols nationaux (220 heures). Parmi celles-ci, 211.5 heures ont été prestées dans le cadre des missions de la Garde côtière belge. Le contrôle de la pollution est arrivé sans conteste à la première place des heures prestées (164 heures) avec à la fois la surveillance des rejets d’hydrocarbures, d’autres substances liquides nocives et d’ordures (respectivement annexes I, II et V de MARPOL) mais également le contrôle des émissions de soufre et d’azote provenant des navires dans l’air (application de l’annexe VI de MARPOL). En plus du contrôle de la pêche qui a également été traité (42.5 heures à la demande du service flamand « Dienst Zeevisserij »), l’avion a été mobilisé à plusieurs reprises pour vérifier la pollution marine, pour soutenir les opérations de sauvetage de transmigrants dans les eaux françaises et pour localiser du matériel de recherche et de sauvetage perdu (3 heures), et deux heures d’appui aérien ont été fournies lors d’exercices de contrôle de la pollution. Huit heures et demie ont par ailleurs été consacrées à la surveillance des mammifères marins.

Les vols internationaux, dans le cadre de l’accord de Bonn ont représenté 24 heures de vol en 2022 (voir ci-dessous : une mission Tour d’horizon et la participation aux essais en mer MANIFESTS).

Déversements par les navires

En août 2022, quelques nappes de pétrole ont été observées lors de plusieurs vols dans les eaux britanniques à hauteur de Ramsgate. Ces nappes provenaient apparemment d’une fuite dans la citerne de carburant d’une vieille épave immergée. Ce cas a donc été qualifié de déversement accidentel et plusieurs navires britanniques se sont chargés du nettoyage. Il n’y a pas eu d’impact direct sur les eaux belges.

Deux déversements opérationnels d’hydrocarbures ont été recensés en 2022 ce qui confirme la tendance baissière de ces observations durant la dernière décennie (voir graphique ci-dessous). La première pollution par hydrocarbures a été observée déjà très altérée dans l’embouchure de l’Escaut occidental dans les eaux néerlandaises. La nappe d’hydrocarbures n’a pas pu être combattue et n’a pas pu être reliée à un quelconque pollueur. La deuxième nappe d’huile était plus limitée et a été observée dans la zone d’ancrage du Westhinder. Elle semblait être liée à un vraquier au mouillage. Un contrôle en mer par la police de la navigation n’a pas amené de nouveaux éléments qui auraient pu confirmer la suspicion d’infraction.

Le nombre de déversements d’hydrocarbures observés par heure de vol est tombé à presque zéro. (@ IRSNB/UGMM)

En 2022, aucune violation de l’annexe V de la convention MARPOL concernant le rejet d’ordures et de matériaux solides en vrac n’a été détectée. Par contre, pas moins de 17 cas de pollution opérationnelle par des substances liquides nocives autres que des hydrocarbures (MARPOL Annexe II) ont été observés. Un de ceux-là a pu être mis en lien avec un navire dans les eaux britanniques. Le dossier a été transféré aux autorités britanniques compétentes pour vérification et suivi ultérieur.

Au contraire des déversements d’hydrocarbures, la pollution par des substances liquides nocives reste un problème courant qui semble même être en légère hausse (voir graphique). Il s’agit souvent, mais pas toujours, de rejets autorisés par les navires, conformes aux normes internationales de rejet. Depuis 2021, des normes de rejet plus strictes sont entrées en vigueur, notamment pour ce que l’on appelle les « flottants persistants », tels que les substances apparentées à la paraffine. Aucune infraction n’a cependant été détectée à leur sujet en 2022.

Les pollutions avec d’autres substances nocives suivent une légère tendance à la hausse. (@ IRSNB/UGMM)

Trois nappes de pétrole ont également été identifiées dans les ports belges : deux dans le port d’Anvers-Bruges et une dans celui d’Ostende. Les deux nappes de pétrole dans le port d’Anvers ont été observées lors de vols de transit entre l’aéroport d’Anvers (la base d’attache de l’avion) et la mer du Nord. L’une de ces deux détections impliquait un groupe de trois taches plus petites avec cinq navires différents à proximité. Les taches n’ont pu être clairement reliées à aucun de ces navires. L’autre nappe a été repérée au niveau du terminal gazier d’Anvers-Bruges lors d’une opération de soutage. Une nappe de pétrole a également été observée dans le port d’Ostende en 2022. Il s’agissait alors d’une petite nappe sans pollueur et trop limitée pour pouvoir être combattue. Toutes ces observations ont immédiatement été signalées aux autorités compétentes afin d’en assurer le suivi.

Pollution par hydrocarbures dans le port d’Anvers. (© IRSNB/UGMM)

Surveillance des émissions des navires en mer

Grâce à l’utilisation d’un capteur renifleur dans  l’avion, notre pays est considéré comme un pionnier dans la lutte internationale contre la pollution atmosphérique par les navires en mer (surveillance et mise en application de l’annexe VI  de la convention MARPOL). Le capteur permet en effet de mesurer sur le terrain différents polluants atmosphériques dans l’échappement des navires.

La mesure des émissions de soufre fait déjà partie du programme depuis 2016. Afin de contrôler les limites strictes de soufre qui s’appliquent au carburant des navires dans la zone de contrôle des émissions de soufre de la mer du Nord  (emission control area ou ECA), 61 vols-renifleurs (pour un total de 91 heures) ont été effectués par l’avion en 2022 au-dessus de la zone de surveillance belge. Sur les 965 navires dont les émissions de soufre ont été mesurées, 47 présentaient une teneur en soufre élevée et suspecte. Ces navires ont été dûment signalés aux services d’inspection maritime compétents et 13 ont ensuite été inspectés à terre.

L’avion de surveillance en action lors d’un vol ‘sniffer.’ (© IRSNB/UGMM)

Grâce à l’intégration réussie d’un capteur de NOx en 2020, l’avion de l’UGMM peut également mesurer les concentration de composés azotés (NOx) dans les panaches de fumée des navires afin de surveiller et faire respecter les limites plus strictes qui s’appliquent depuis le 1er janvier 2021 dans la zone de contrôle des émissions de la mer du Nord. La Belgique est ainsi devenue le premier pays prêt à assurer le suivi de ces restrictions plus strictes. Sur les 963 navires pour lesquelles les émissions d’azote ont été contrôlées en 2022, 35 valeurs suspectes ont été signalées.

Depuis 2021, un nouveau capteur de carbone noir a été ajouté à la configuration du renifleur. Ce capteur mesure le carbone noir, qui est une mesure de la concentration de suie dans les émissions des navires. La concentration en suie de 182 navires a été mesurée en 2022. Dans le cas de mesures de concentrations de suie exceptionnellement élevées, les autorités portuaires maritimes compétentes sont invitées à prélever un échantillon du carburant utilisé. En 2023, ces échantillons de carburant seront analysés dans le laboratoire éco-chimique de l’IRSNB.

Panache de fumée d’un navire porte-conteneurs. (© IRSNB/UGMM)

Missions internationales

Lors de la mission internationale annuelle « Tour d’Horizon » de surveillance de la pollution marine provenant des plateformes de forage dans la partie centrale de la mer du Nord (dans les eaux offshore néerlandaises, danoises, britanniques et norvégiennes), effectuée dans le cadre de l’accord de Bonn en septembre 2022, l’avion de surveillance a détecté un total de 16 pollutions. 15 de celles-ci consistaient en une pollution par hydrocarbures en plus desquelles une détection d’une substance inconnue n’a pas pu être vérifiée visuellement en raison d’un plafond nuageux trop bas. 13 pollutions ont pu être liées directement à une plateforme pétrolière. Les trois nappes restantes ont été observées sans navire ou plateforme à proximité. Toutes ces observations ont été systématiquement rapportées à l’Etat côtier compétent pour suivi ultérieur.

Pétrole lié à une plateforme de forage lors de la mission Tour d’Horizon en 2022. (© IRSNB/UGMM)

L’équipe a participé du 30 mai au 2 juin aux MANIFESTS Sea Trials en Bretagne (France) pour la détection des pollutions de nature chimique. La participation à de tels exercices internationaux est cruciale considérant que la pollution par d’autres produits chimiques en mer est en constante augmentation (voir plus haut), qu’un grand nombre de produits chimiques différents sont transportés, avec chacun un comportement spécifique en mer et que les réglementations sont très complexes (annexe II de MARPOL). Lors des MANIFESTS Sea Trials, plusieurs capteurs ont pu être testés pour déterminer leur capacité à identifier différentes substances.  L’avion de surveillance a pu contribuer de manière constructive à la collecte des données. Il appartient maintenant aux scientifiques d’optimiser les capteurs afin de mieux surveiller les rejets chimiques à l’avenir.

La mission en Bretagne a été combinée avec une surveillance des émissions atmosphériques à la frontière de la zone ECA, à l’entrée de la Manche. Les navires y doivent basculer vers des carburants à faible teneur en soufre. Au total, 62 navires ont été contrôlés parmi lesquels 18 à proximité immédiate de la frontière. Six des 18 navires contrôlés à la frontière présentaient des taux de soufre suspects et deux des émissions de NOx élevées.  Ces résultats préliminaires montrent qu’une surveillance accrue à la frontière de la zone ECA est nécessaire afin d’améliorer l’application de l’annexe VI de la convention MARPOL.

Une nappe de produits chimiques. (© IRSNB/UGMM)

Suivi des mammifères marins

En 2022, l’IRSNB a réalisé des recensements de mammifères marins en mars et en octobre. Respectivement, 235 et 45 marsouins ont été observés ce qui résulte en des concentrations moyennes de 3.3 et 0.8 animaux par km² de surface observée. Cela représente beaucoup de marsouins pour une surface semblable à celle des eaux belges, tout en les chevauchant largement: plus de 11.000 en mars et plus de 2.000 en octobre. Un nombre relativement élevé de phoques ont également pu être observés en 2022: 20 en mars et 40 en octobre. Jamais il n’y en a eu autant.

Observations lors de la campagne de mars 2022 : marsouins en rouge et phoques en jaune. (© IRSNB/UGMM)

Surveillance maritime élargie dans le cadre de la Garde côtière

Dans le cadre de la coopération au sein de la Garde côtière, l’avion de surveillance contribue également à des missions plus larges de mise en application de la réglementation maritime et de la sécurité en mer. Ainsi, les opérateurs aériens ont signalé, en 2022, 46 infractions à la navigation en mer à la centrale de la Garde côtière et à la Direction-générale de la Navigation (SPF Mobilité et Transport). Il s’agit ici principalement de navires qui naviguent à contresens ou qui vont au mouillage dans les routes de navigation. Vu le nombre croissant de ce type d’infractions et par conséquent le risque accru de collisions, la Direction-générale de la navigation assure un suivi juridique spécifique à ce sujet depuis janvier 2023.

En outre, 11 infractions liées à l’intrusion dans des zones entourées d’un périmètre de sécurité (par exemple autour des parcs éoliens). Ce chiffre est en hausse lui-aussi, ce qui peut s’expliquer en partie par l’introduction de quelques nouvelles zones interdites, telles que la ferme aquacole au large de Nieuport et la zone d’étalonnage des instruments scientifiques (à hauteur d’Ostende).

Intrusion de trois navires de pêche dans le périmètre de sécurité de la tour radar du Oostdyck. (© IRSNB/UGMM)

Finalement, en 2022, pas moins de 17 navires ont été observés sans AIS, un système automatique d’identification qui permet, entre autres, d’éviter les collisions. Dans 16 de ces cas, il s’agissait de navires de pêche. Ici également, on peut déplorer une tendance à la hausse.

SEADETECT : Réduire les collisions entre les navires et les baleines

Dans le cadre du projet SEADETECT financé par le programme LIFE de l’Union européenne, l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique contribuera au développement et à la validation d’un système de détection automatique des mammifères marins pour prévenir les collisions entre les navires et les cétacés.

Un rorqual commun reste coincé sur le bulbe d’étrave d’un navire après une collision, arrivant avec lui dans le port de Gand en novembre 2015. (© IRSNB/J. Haelters)

Aujourd’hui, l’économie mondiale repose principalement sur le trafic maritime qui représente 80 % du commerce mondial en volume et 70 % en valeur. Ce trafic intense implique un nombre croissant de navires se déplaçant de plus en plus vite sur les mers et les océans du monde, ce qui augmente considérablement le risque de collision avec les cétacés.

Les collisions entre les navires et les baleines entraînent souvent la mort des animaux. Au cours des dernières décennies, le trafic maritime, combiné à l’augmentation de la vitesse des navires, a entraîné un doublement du nombre de collisions mortelles. Plusieurs études ont montré que les collisions avec les navires sont la principale cause de mortalité des cétacés dans certaines régions. Par exemple, les collisions avec les navires sont la principale forme de mortalité des rorquals communs et des cachalots dans le Sanctuaire Pelagos en Méditerranée, une zone pour laquelle la France, Monaco et l’Italie ont conclu un accord de protection des mammifères marins.

Dans l’Arctique, le changement climatique devrait entraîner une exposition accrue des espèces de cétacés vulnérables au risque de collision. À l’échelle mondiale, la réduction de la mortalité due aux collisions profitera aux populations de baleines qui se remettent encore des effets de la surchasse historique et continuent de souffrir de la dégradation de l’habitat causée par l’homme.

Face à cette situation, le projet SEADETECT développe une nouvelle solution qui devrait permettre aux navires de réduire de 80 % les collisions avec les cétacés.

Prévenir les collisions entre les navires et les baleines

Les collisions sont souvent dues à la combinaison de trois facteurs : la capacité de détection, le temps de réaction de l’équipage et le temps nécessaire pour manœuvrer le navire, qui dépendent tous de la taille et de la vitesse du navire et de l’état de la mer. Le projet SEADETECT développera trois systèmes pour réduire ces collisions :

  • Un système à bord des navires qui détectera en temps réel les objets non identifiés, en particulier les mammifères marins.
  • Un réseau de bouées de surveillance acoustique passive situées dans les zones à risque en mer qui déterminera et triangulera la position des cétacés en temps réel.
  • Un logiciel de partage des données de détection, alimenté par les détections, pour informer les navires dans la zone des risques de dangers.
Schéma du projet SEADETECT pour la détection automatisée des mammifères marins et des obstacles, et système anti-collision pour les navires. (© SEADETECT)

Le RV Belgica comme plateforme d’essai

« Le système de détection automatique et d’anticollision sera utilisé dans l’infrastructure multisensorielle existante du navire national de recherche océanographique RV Belgica et sera validé par les scientifiques de l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique au cours des expéditions et des campagnes de surveillance du navire. » clarifie Bob Rumes de l’équipe de d’écologie et de gestion marine de l’IRSNB (MARECO).

Le système de détection automatique et d’anticollision détectera de manière autonome les cétacés, mais aussi les obstacles ou les objets flottants tels que les conteneurs, afin d’éviter les collisions avec les navires. Grâce à un système performant de fusion et de traitement des données, cette solution permettra de détecter en temps réel un objet de 2 mètres de long en surface à une distance de 1 km, de jour comme de nuit, même dans des conditions maritimes complexes (forts états de mer ou mauvaises conditions météorologiques). Par ailleurs, les chercheurs étudieront également l’impact d’une application générale de ce système de détection et d’anti-collision sur plusieurs espèces cibles comme alternative à d’autres mesures possibles.

Le RV Belgica sera également utilisé comme plate-forme d’essai dans le cadre de SEADETECT. (©Belgian Navy/J. Urbain)

Le projet SEADETECT, coordonné par Group Naval (FR), durera quatre ans et réunira dix partenaires de trois pays européens : Belgique, France et Italie. De plus amples informations sont disponibles sur le site web du projet : https://life-seadetect.eu/ .

Le programme LIFE est un instrument financier de la Commission européenne destiné à soutenir des projets privés et publics innovants dans les domaines de l’environnement et du climat.

Lancement du projet Anemoi : vers une pollution chimique minimale et une durabilité accrue de la production d’énergie éolienne en mer

L’énergie éolienne en mer présente de nombreux avantages : outre l’objectif premier de produire de l’énergie renouvelable, les parcs éoliens en mer offrent également des possibilités de combinaison avec des activités de conservation de la nature et d’aquaculture. Les impacts environnementaux des parcs éoliens en mer du Nord font l’objet d’études approfondies, une grande attention étant déjà accordée à l’introduction de nouveaux habitats, au bruit sous-marin et à l’exclusion des pêcheries. Cependant, l’impact chimique des parcs éoliens offshore n’est pas encore très bien connu. Le nouveau projet Anemoi permettra de mieux comprendre cet impact, (1) en identifiant les émissions chimiques pertinentes de polluants connus et inconnus provenant des parcs éoliens offshore, (2) en évaluant l’impact sur l’écosystème et les activités aquacoles, (3) en examinant les réglementations actuelles et (4) en proposant des solutions et des options durables pour réduire les émissions chimiques des parcs éoliens offshore.

Les produits chimiques pénètrent dans le milieu marin par de nombreuses sources terrestres, liées à l’industrie, à la circulation ou aux ménages, et par des activités en mer telles que la navigation, la mariculture, le dragage et l’énergie offshore.

Au cours des quatre prochaines années (2023-2027), 11 instituts européens étudieront l’occurrence et les impacts des émissions chimiques provenant des parcs éoliens offshore en mer du Nord. Les fondations des éoliennes contiennent des systèmes de protection contre la corrosion, qui rejettent dans la mer des métaux tels que l’aluminium ou le zinc. Les peintures appliquées sur les turbines rejettent des composés organiques dans l’eau, tandis que la peinture peut se fissurer et s’écailler sous l’effet du mouvement des vagues, et que des particules de plastique peuvent être arrachées des pales des turbines.

Les objectifs

Dans le cadre d’Anemoi, la concentration et la distribution de composés chimiques connus et inconnus dans l’eau et les sédiments seront identifiées au moyen d’une surveillance sur le terrain et d’expériences en laboratoire (par exemple, en imitant la distribution des particules dans un système de canal à vagues).

L’impact des lixiviats chimiques provenant des éoliennes offshore sur la vie marine et les différents produits de l’aquaculture sera également évalué par le biais d’études écotoxicologiques et d’évaluations des risques, et les effets à différents niveaux trophiques seront modélisés pour les composés chimiques simples et mixtes.

En outre, différentes réglementations sont actuellement en place aux niveaux national et européen pour limiter l’impact des émissions chimiques des parcs éoliens offshore. Les réglementations dans la région de la mer du Nord seront examinées afin de proposer un cadre réglementaire harmonisé. Enfin, Anemoi étudiera des solutions durables et non nocives (par exemple, des systèmes alternatifs de protection contre la corrosion) et des optimisations pour réduire davantage les émissions chimiques des éoliennes en mer.

Un départ en trombe

Le travail de terrain a déjà commencé. Lors d’une campagne en mer fin avril 2023, des échantillons d’eau et de sédiments ont été prélevés sur plus de 40 sites. Les sites échantillonnés se trouvaient dans et à proximité de parcs éoliens dans les eaux marines belges, ainsi que dans des zones de référence situées à une plus grande distance des parcs éoliens.

Équipe d’échantillonnage ILVO – IRSNB et échantillons prélevés à bord du RV Belgica © IRSNB

Les photos d’accompagnement illustrent le travail d’échantillonnage à bord du RV Belgica par les scientifiques de l’IRSNB et d’ILVO. Des échantillons d’eau ont été pris avec un échantillonneur « MERCOS » (de BSH) pour l’analyse des métaux et avec le dispositif « GIMPF » (Geesthach Inert Microplastic Fractionator, de Helmholtz Centrum Hereon) pour l’analyse des microplastiques.

Des échantillons de sédiments ont été réalisés avec un box corer pour plusieurs analyses : métaux, composants organiques et microplastiques. Les méthodes sont complètement harmonisées avec le travail effectué lors de la croisière dans les eaux marines allemandes en mai 2023.

L’échantillonneur MERCOS et le Box corer en action lors de la première campagne de terrain Anemoi dans les eaux belges © IRSNB

L’IRSNB analysera la quantité de particules microplastiques, y compris les particules de peinture, dans la couche supérieure des sédiments afin d’identifier les émissions des éoliennes et d’étudier la distribution de ces particules à l’intérieur et à proximité des parcs éoliens en mer.

Le GIMPF Geesthach Inert Microplastics Fractionator © ILVO

La coopération est la clé

Pour atteindre les objectifs du projet, Anemoi travaillera en étroite collaboration et interaction avec l’industrie des parcs éoliens offshore et les décideurs politiques. Le travail sur le terrain a déjà commencé, et un premier événement pour les parties prenantes est prévu les 30 et 31 mai 2023 à Hambourg (Allemagne), afin d’échanger des connaissances sur les effets et les risques des émissions chimiques des parcs éoliens offshore et de discuter des solutions potentielles pour accroître encore la durabilité de l’énergie éolienne en mer.

 

Le projet Anemoi est financé par le programme Interreg Mer du Nord, avec cofinancement de Provincie West-Vlaanderen (Belgique et VLAIO (Belgique), et est coordonnée par Flanders Research Institute for Agriculture, Fisheries and Food (ILVO, Belgium). Plus d’informations : site web & LinkedIn.

Les partenaires : l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique (IRSNB, Belgique); Federal Maritime and Hydrographic Agency (BSH, Allemagne); Sintef Ocean AS (Norvège); l’Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer (Ifremer, France); Provincial Development Agency West-Flanders (POM-WVl, Belgique); Foundation of Dutch Scientific Research Institutes – The Royal Netherlands Institute for Sea Research (NWO I – NIOZ, Pays-Bas); Helmholtz Centrum Hereon (Hereon, Allemagne); University of Technology Braunschweig (TU BS, Allemagne); University of Antwerp (UAntwerp, Belgique); Technical University of Denmark (DTU, Danemark).

Éoliennes offshore dans la partie belge de la mer du Nord © ILVO

Cybermenaces dans le secteur maritime : groupe de travail sur la cybersécurité

En janvier 2023, le monde maritime a été secoué par une attaque de ransomware à grande échelle contre une société de classification de premier plan. Plus de 1000 navires ont été touchés. Cette attaque n’est malheureusement pas un incident isolé : ces dernières années, l’ensemble du secteur maritime, des ports aux sociétés de classification en passant par les navires de tourisme, a été la cible de cyberattaques à plusieurs reprises. C’est pourquoi, il y a quelques années, le groupe de travail sur la cybersécurité a été créé au sein du Forum européen des garde-côtes. Grâce, notamment, aux connaissances échangées par les États membres au sein du groupe de travail sur la cybersécurité, de nombreuses attaques peuvent être évitées chaque année. Ce groupe de travail, composé de 32 experts des différents États membres, s’est réuni du 22 au 24 mai à Bruxelles. 

Nouvelles perspectives et développements  

Au cours de ce rassemblement, sept présentations ont été effectuées, couvrant divers aspects de la cybersécurité. Les orateurs belges ont abordé le thème de l’impact géopolitique sur la structure et les activités des garde-côtes et ont présenté le Centre pour la cybersécurité en Belgique et le tout nouveau Commandement cybernétique, qui fait partie du ministère de la défense. Par ailleurs, l’AESM (Agence européenne pour la sécurité maritime) a parlé de sa nouvelle « cyber task force » et de la formation qu’elle organisera sur la cybersécurité à l’intention des inspecteurs. Ensuite, l’EFCA (Agence européenne de contrôle des pêches) a fait une présentation sur les préoccupations croissantes que suscitent les cybermenaces dans le secteur de la pêche. Les exercices de cybersécurité maritime, les dernières recherches sur la cybersécurité maritime et, enfin, l’équipe française d’intervention en cas d’urgence informatique maritime sont autant de sujets intéressants qui ont également été abordés.

Au cours de la dernière journée de conférence, Eurocontrol a présenté la manière dont il traite les interférences GNSS dans l’aviation, afin de tirer parti de l’expertise de chacun. Le groupe de travail a ensuite discuté des orientations possibles pour le groupe à court et moyen terme, et a élu son nouveau président.

Défis futurs en matière de cybersécurité

La menace permanente des cyberattaques nécessite un bon échange de connaissances entre les différents pays. Ces dernières années, le groupe de travail sur la cybersécurité a constitué une plate-forme de consultation précieuse. Compte tenu de l’évolution actuelle, une coopération européenne plus étroite par l’intermédiaire de l’AESM devrait s’avérer nécessaire dans un avenir proche. De cette manière, le secteur maritime continuera à être protégé autant que possible contre les futures cybermenaces.

La Garde Côtière est une organisation unique en Belgique sui rassemble en coordonne l’expertise de 17 partenaires du secteur maritime, pour garantir la sécurité et la sûreté en mer. Le service scientifique « Unité de Gestion du Modèle Mathématique de la Mer du Nord (UGMM) », qui fait partie de l’Institut royal des sciences naturelles de Belgique (IRSNB), est un des partenaires.

En 2022-2023, la Garde Côtière belge préside l’European Coast Guard Functions Forum (ECGFF). En collaboration avec les agences européennes FRONTEX, EMSA et EFCA, elle organise un certain nombre d’ateliers au cours de l’année. En coopération avec la DG Mare de la Commission européenne, elle organise également un groupe de travail sur la cybersécurité et le sommet qui aura lieu à la fin du mois de septembre 2023.

30 ans de surveillance aérienne belge de la mer du Nord

Bien que la partie belge de la mer du Nord ne représente que 0,5 % de la surface de la mer du Nord, elle se trouve sur l’une des voies maritimes les plus fréquentées au monde et combine un grand nombre d’activités humaines dans un espace limité. Raison de plus pour surveiller de près la santé de l’environnement marin et le respect de la réglementation par les nombreux acteurs depuis les airs également. Dans le rapport d’activité pluriannuel qui vient d’être publié, l’équipe de surveillance aérienne de l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique décrit les différentes missions et les résultats, les tendances et les développements du programme belge de surveillance aérienne au-dessus de la mer du Nord sur une période de 30 ans, depuis sa création en 1991 jusqu’en 2021. Les chiffres sont impressionnants.

Le rapport « 30 ans de surveillance aérienne belge de la mer du Nord : évolution, tendances et développements » a été présenté le 16 mai 2023 au Restaurant Runway à Ostende, en collaboration avec les cabinets fédéraux de M. Thomas Dermine, Secrétaire d’Etat à la Relance et aux Investissements stratégiques, en charge de la Politique scientifique, et de M. Vincent Van Quickenborne, Vice-Premier Ministre et Ministre de la Justice et de la Mer du Nord, et avec le soutien de l’Aéroport international de Bruges-Ostende.

Le secrétaire d’État Thomas Dermine (gauche) avec l’équipe de surveillance aérienne. De gauche à droite : Brigitte Lauwaert (chef de l’UGMM), Ward Van Roy (opérateur), Annelore Van Nieuwenhove (opérateur), Kobe Scheldeman (opérateur), Geert Present (pilote), Jean-Baptiste Merveille (opérateur), Pieter Janssens (pilote), Alexander Vermeire (pilote) & Dries Noppen (pilote). Absent : Ronny Schallier (coordinateur de l’équipe aérienne). (Image : IRSNB/UGMM)

Tâches de la surveillance aérienne

Les tâches essentielles du programme belge de surveillance aérienne peuvent être regroupées en deux thèmes :

Surveillance de la pollution illégale et accidentelle : Outre la détection de la pollution marine par les navires (rejets d’hydrocarbures et d’autres liquides nocifs), la Belgique joue actuellement un rôle de premier plan au niveau international dans la surveillance des émissions de soufre et d’azote des navires dans l’atmosphère. L’avion joue également un rôle dans la surveillance coordonnée au niveau international des installations pétrolières et gazières en mer du Nord.

Surveillance environnementale et scientifique : L’équipe effectue d’importantes tâches de surveillance scientifique, notamment le comptage des mammifères marins et la surveillance de diverses activités

humaines en mer soumises à des permis environnementaux (extraction de sable et de gravier, construction de parcs éoliens, respect des zones marines protégées, etc.).

Surveillance maritime élargie dans le cadre de la Garde Côtière : ces tâches comprennent le contrôle des activités de pêche, le respect des règles de navigation et les infractions à l’AIS par les navires (non-utilisation du système d’identification automatique).

En opérant dans ces trois domaines, la surveillance aérienne apporte une contribution importante à la gestion durable de la mer du Nord belge.

La pollution pétrolière en mer du Nord vue du ciel (Image : IRSNB/UGMM)

Faits et chiffres

Le rapport décrit comment la surveillance aérienne de la mer a évolué, passant de la surveillance de la pollution marine dans les premières années à une surveillance environnementale et maritime plus large de la mer, suite à l’extension de la juridiction belge en mer et à la création de la Garde côtière belge.

En ce qui concerne la pollution, les principaux éléments du programme belge de surveillance aérienne de la mer du Nord pour la période 1991-2021 peuvent être résumés comme suit :

  • 9574 heures de vol ont été effectuées, dont 7100 heures de vol en mer (environ 6400 heures de vol au niveau national et 700 heures au niveau international).
  • Dans la zone d’étude belge, 625 déversements opérationnels (délibérés) d’hydrocarbures ont été signalés, entraînant une pollution estimée à 1013 tonnes d’hydrocarbures. Au début de la surveillance, les déversements d’hydrocarbures constituaient un problème majeur ; aujourd’hui, ils appartiennent presque entièrement au passé.
  • 158 rejets opérationnels d’autres liquides nocifs (par exemple, huiles végétales, biodiesel, paraffine) ont été détectés. Ce type de pollution présente malheureusement une légère tendance à la hausse.
  • 51 navires ont été pris en flagrant délit de rejets illégaux.
  • Dans ou autour de la zone marine belges, 35 accidents maritimes graves impliquant une pollution marine accidentelle ou un risque élevé de pollution se sont produits. Dans 26 de ces cas, l’avion a été activés pour surveiller l’urgence depuis le ciel et fournir un soutien aérien aux unités d’intervention.
  • 24 missions internationales « Tour d’Horizon » ont été effectuées, inspectant des installations gazières offshore et des plates-formes de forage dans la partie centrale de la mer du Nord. Elles ont donné lieu à 430 heures de vol et à un total de 296 détections de pollution (272 détections d’huile minérale, 9 détections d’un polluant autre que l’huile et 15 polluants dont la nature n’a pas pu être déterminée visuellement).
  • Il y a eu une participation à 10 « Opérations coordonnées de contrôle étendu de la pollution » (Coordinated Extended Pollution Control Operations), des missions régionales consistant en une série de vols consécutifs de contrôle de la pollution effectués par plusieurs avions de surveillance de différents pays de la mer du Nord.
  • L’avion belge a participé à un total de 33 exercices nationaux et internationaux de lutte contre la pollution et aux essais en mer correspondants.
  • Depuis 2015, 353 vols de contrôle des émissions ont été effectués avec un capteur renifleur et 6012 panaches d’échappement ont été échantillonnés. 9 % des navires contrôlés présentaient des niveaux de soufre suspects. Depuis 2020, lorsque l’avion a été équipé d’un capteur de NOx, 3 % des navires contrôlés n’étaient pas conformes aux réglementations internationales en matière de NOx. Ce type de surveillance des émissions gazeuses des navires en mer est un travail de pionnier belge et a grandement contribué au nom et à la renommée de l’équipe de surveillance de l’air.
L’avion de surveillance aérienne se prépare à inspecter les émissions d’un navire en mer. (Image : IRSNB/UGMM)

Les chiffres marquants relatifs à la surveillance de l’environnement marin, de l’activité de pêche et des règles de navigation sont les suivants :

  • De 2009 à 2021, 214 heures de vol ont été consacrées au comptage des mammifères marins. Au cours des campagnes de surveillance, un total de 3223 marsouins ont été observés (de 3 à 404 animaux par étude, soit une moyenne de 87 par étude). De plus, 100 phoques ont été observés et sporadiquement d’autres espèces de mammifères marins comme des dauphins à bec blanc, des grands dauphins, un petit rorqual et une baleine à bosse.
  • De 1993 à 2021, 1239 vols de contrôle des pêches ont été effectués, ce qui représente un total de 1185 heures de vol. Au total, 7272 navires de pêche ont été contrôlés et identifiés.
  • Entre 2011 et 2021, 112 infractions concernant l’utilisation des systèmes d’identification automatique par les navires ont été constatées, ainsi que 148 infractions de navigation. Ces dernières années, le nombre annuel d’infractions de navigation constatées a fortement augmenté, le nombre le plus élevé étant celui de 2021 (36).
Phoques sur un banc de sable le long de l’Escaut occidental. (Image : IRSNB/UGMM)

L’avenir de la surveillance aérienne

Sur la base de ces faits et chiffres et de leur interprétation, le rapport d’activité se tourne également vers l’avenir. Il explique l’évolution du programme, qui est passé de la lutte contre la pollution marine et de la surveillance de l’environnement à une surveillance maritime plus large à l’appui du cadre général de la Garde côtière, et indique que les défis de fond de la surveillance aérienne au-dessus de la mer sont et resteront innombrables dans les années à venir.

En effet, outre les tâches décrites ci-dessus, un certain nombre de nouvelles tâches deviennent de plus en plus importantes pour la surveillance aérienne, telles que l’application efficace d’une nouvelle frontière extérieure européenne (post-BREXIT), la promotion de la sécurité maritime et la fourniture d’un soutien aux opérations de recherche et de sauvetage.

Enfin, le rapport explique également la nécessité de renouveler l’avion à moyen terme. Ce n’est qu’ainsi que la Garde côtière pourra renouveler sa vision stratégique et renforcer sa coopération en matière de surveillance aérienne, et moderniser et étendre ses capacités de surveillance afin de répondre efficacement aux besoins actuels et futurs en mer.

Le secrétaire d’État à la Politique scientifique, Thomas Dermine, reçoit un briefing de sécurité avant de commencer son vol au-dessus de la mer du Nord. (Image : IRSNB/UGMM)

Thomas Dermine, secrétaire d’état à la politique scientifique, qui a également participé personnellement à un vol opérationnel de l’avion de surveillance aérienne avant la présentation du rapport le 16 mai : « La Mer du Nord est un écosystème complexe, une importante zone de pêche, une zone de navigation très fréquentée, un espace où se déroulent de nombreux trafics et, depuis le Brexit, une frontière extérieure de l’Union européenne. Il est donc essentiel de l’étudier et de surveiller en continu ce qui s’y passe. L’avion de surveillance côtière remplit cette mission depuis 30 ans, grâce à une collaboration fluide entre la Défense nationale et l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique. L’avion étant aujourd’hui frappé d’obsolescence, je porterai avec toute l’énergie nécessaire le dossier de son renouvellement. »

Vincent Van Quickenborne, ministre de la mer du Nord : « La Belgique a été le premier et le seul pays au monde à utiliser un avion renifleur pour contrôler la pollution des navires. Quelque 5 500 navires différents font escale dans les ports belges chaque année. Il est donc impossible de les contrôler tous. Avec l’avion renifleur, le travail peut être beaucoup plus ciblé car les navires suspects sont déjà identifiés en mer.  Grâce à la surveillance aérienne, nos services d’inspection portuaire peuvent détecter 50 % d’infractions en plus et économiser 20 % par inspection. Nous devons chérir notre mer du Nord. C’est la plus grande réserve naturelle de Belgique. Le nombre croissant de mammifères marins et le retour d’espèces telles que l’huître plate européenne, qui est réapparue dans notre mer du Nord pour la première fois depuis des décennies, montrent que des progrès sont réalisés. Mais l’avion a besoin d’être remplacé après 30 ans de service en tant que renifleur. Avec mon collègue Dermine, j’y mets tout mon poids ».

 

La mise en œuvre du programme belge de surveillance aérienne de la mer du Nord est organisée par l’Unité de Gestion du Modèle Mathématique de la mer du Nord (UGMM), service scientifique de l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique (IRSNB).

Pour la surveillance aérienne, l’UGMM utilise un avion Britten Norman Islander (immatriculation OO-MMM) équipé de capteurs scientifiques pour la détection de la pollution marine. L’avion est la propriété de l’IRSNB/UGMM, mais ne peut voler que grâce au soutien des domaines politiques fédéraux de la science politique et de la mer du Nord et à la bonne coopération avec la Défense, qui fournit les pilotes.